samedi 12 décembre 2020

Sahara marocain : Fin de partie

 La reconnaissance par le président américain Donald Trump de la souveraineté marocaine sur le Sahara est une de ces décisions historiques qui marquent un tournant. C’est, à ne pas en douter, un événement majeur qui bouleverse la donne et oblige à une réévaluation de la situation. C’est, enfin, un échec cuisant de l’Algérie, qui vient s’ajouter à une série de déconvenues provoquées par la multiplication des ouvertures de consulats dans les provinces du sud, qu’Alger n’a pas pu empêcher malgré les menaces. Le coup le plus douloureux est venu des Emirats, une forte partie s’il en est, face à laquelle Alger, impuissant, n’a pu que contenir sa rage et se tenir coi.

Et maintenant les Etats-Unis d’Amérique !

Que va faire l’Algérie ? Que peut-elle faire ?

Jusqu’au jeudi 10 décembre, il ne faisait pas de doute que le pouvoir algérien n’allait pas rester sur ses échecs multiples.

L’affaire dite du Sahara continue à faire la une des médias algériens aux ordres. La question est rituellement évoquée dans le journal télévisé du soir, entre deux sujets sur des activités civiles menées par des militaires. Des « débats » sont organisés sur cette question avec la participation d’« experts » qui rivalisent d’hostilité et de propos haineux envers le Maroc et travestissent la réalité à leur guise.

C’est dire que le pouvoir algérien, bien qu’isolé, discrédité et désavoué, ne veut rien lâcher.

Sur le plan diplomatique, l’Algérie a essayé par l’intermédiaire de l’Afrique du sud de saisir le conseil de sécurité, en vain. À l’Union africaine (UA), elle a tenté d’évoquer la question du Sahara, sans succès. Le ministre des affaires étrangères Boukadoum estime que le « mécanisme africain » de la Troïka qui a été établi lors de la 31ème réunion de l’UA à Nouakchott en juillet 2018 a échoué. Il ne veut surtout pas d’une Troïka menée par le prochain président en exercice de l’UA, le président congolais Félix Tshisekedi, un ami du Maroc. L’Algérie voudrait remettre en selle le Conseil de paix et de sécurité (CPS), alors même que les chefs d’Etat et de gouvernement africains ont écarté le CPS, qui ne peut plus traiter de la question du Sahara aux niveaux des ambassadeurs et des ministres. Le CPS a longtemps été une arme aux mains de son président, l’Algérien Smaïl Chergui, dont le mandat, fort heureusement, s’achève cette année. Chergui a mené une politique anti-marocaine systématique, en se servant habilement du CPS. C’est dans le CPS, au niveau des représentants permanents et en l’absence des délégués du Maroc, qu’ont été conçues toutes les décisions hostiles à notre pays.   

Sans le CPS et sans Chergui, l’Algérie a perdu l’influence qu’elle a eue au sein de l’UA. Elle n’a même pas pu susciter une réunion urgente de l’organisation africaine. Lors de la récente réunion « pour faire taire les armes », l’allié sud-africain a à peine mentionné la question du Sahara. A Nouakchott, en 2018, les chefs d’Etat et de gouvernement, suivant les recommandations du président de la commission, ont exprimé leur détermination à faire en sorte que « la mise en œuvre de l’agenda de l’UA » ne soit pas « entravée » par la question du Sahara. Le Maroc n’hésitera pas, en cas de besoin, à rappeler cet engagement et à pointer du doigt la partie qui bloque ou entrave le bon fonctionnement de l’UA, à savoir l’Algérie.

Depuis l’épisode d’El Guergarate, le pouvoir algérien a déclenché contre le Maroc une campagne d’une violence inouïe, y compris dans les médias officiels, comme la télévision d’Etat. On a entendu des expressions insultantes comme « armée d’occupation », « agression », « colonisation ». Visiblement, les dirigeants algériens, aveuglés par la colère, voulaient remonter le peuple algérien contre le Maroc et le préparer à une guerre avec le pays voisin. Sabri Boukadoum a affirmé que la question du Sahara « constitue une source de grande inquiétude pour l'Algérie » et que les événements d’El Guergarate « ont posé de sérieux défis susceptibles de mettre en péril la paix et la sécurité dans toute la région ». Le ministre algérien n’a pas précisé la nature de ces « sérieux défis ». En quoi une opération de nettoyage ayant mis fin sans effusion de sang aux agissements d’une poignée de pillards à l’extrême sud du Maroc peut elle constituer une menace pour l’Algérie ? Il ne faut pas oublier que c’est l’actuel chef d’Etat-Major de l’ANP, Said Chanegriha, qui, en 2016, alors qu’il était commandant de la 3eme Région militaire, a qualifié le Maroc, d'« ennemi ». 

Faut-il alors s’étonner de lire dans l’édito de la revue de l’armée El Djeich, dans son dernier numéro, « La détérioration de la situation régionale le long de notre bande frontalière et la menace que font peser certaines parties ennemies sur la sécurité de la région ces derniers temps, ces menaces, même indirectes, nous concernent et nous devons nous tenir prêts à y faire face. Bien plus, nous y sommes contraints parce que notre pays a des obligations régionales imposées par son rôle pivot, outre ses positions de principe immuables de soutien à toutes les causes justes» Et d’ajouter : « Le combat contre ces plans hostiles visant notre pays implique la nécessité, pour notre peuple, d’être conscient des desseins inavoués que cherchent à concrétiser ces parties ennemies et, par voie de conséquence, sa mobilisation autour de sa direction pour les déjouer» 

L’Algérie serait donc encerclée et menacée par des forces hostiles. Lesquelles ? Ce langage guerrier, ajouté au roulage des mécaniques, aux divers exercices et simulations et à la propagation de fausses nouvelles sur de prétendues intentions belliqueuses marocaines, donne clairement à penser que le pouvoir algérien, au pied du mur, était sur le point de se lancer dans une aventure et de commettre l’irréparable. Pour citer le journaliste algérien Hichem Aboud « ceux qui ont provoqué une guerre civile meurtrière dans leur pays pour sauvegarder leurs intérêts sont tout aussi capables de se lancer dans un conflit armé avec le Maroc dans le même but ».

La décision du président Trump de reconnaitre la marocanité du Sahara a stoppé net les velléités guerrières du pouvoir algérien. Désormais, Alger réfléchira à deux fois avant de créer de toute pièce un incident à la frontière, qui servirait de prétexte à une agression contre le Maroc.    

L’Algérie, il faut le lui souhaiter, aura à cœur maintenant de s’occuper de ses problèmes internes, au premier rang desquels la vacance du pouvoir au sommet de l’Etat.

 

A la recherche d’un nouveau président 

Dans l’état actuel des informations disponibles, l’Algérie, selon toute vraisemblance, doit se trouver un nouveau président.

Aux termes de l’article 102 de la constitution algérienne (2016) :

-          Le Parlement, sur proposition du Conseil constitutionnel, doit déclarer l’état d’empêchement du président (pour cause de maladie ou d’absence prolongée),

-          Le Président du Conseil de la Nation (Chambre haute) est chargé de l’intérim du Chef de l’Etat, pour une période maximale de 45 jours,

-          Si l’empêchement se prolonge à l’expiration du délai de 45 jours, ou en cas de décès, il est procédé à une déclaration de vacance par démission de plein droit.

-          Le Président du Conseil de la Nation assume la charge de Chef de l’Etat pour une durée de 90 jours au maximum, au cours de laquelle des élections présidentielles sont organisées.

-          En cas de conjonction de la démission ou du décès du Président de la République et de la vacance de la Présidence du Conseil de la Nation, le Président du Conseil constitutionnel assume la charge de Chef de l’Etat.

(Le président du Conseil de la Nation actuel est M. Salah Goudjil (FLN). Le président du Conseil constitutionnel est M. Kamal Feniche).

Comme on le voit, les options du pouvoir algérien sont limitées. Quel qu’il soit, le président par intérim ne pourra pas changer le gouvernement actuel. Reste l’ultime recours, la proclamation de l’état d’exception, pour se donner le temps de chercher le candidat idoine et pouvoir organiser des élections maitrisées.

 

 


 

Sahara marocain : Territoires « libérés » ?

Le polisario claironne qu’il a réussi à « libérer » la partie du Sahara, environ le tiers, qui se trouve entre le mur de défense et la frontière. Les séparatistes cherchent ainsi à doter la « rasd » de l’élément qui lui fait défaut, l’assise territoriale.

En réalité, le Maroc a volontairement construit le mur à quelques kilomètres de la frontière internationale, pour éviter tout incident. La zone est subdivisée comme on le sait en trois parties : une zone tampon de 5 km de large, une zone d’accès restreint (25 km) et une zone soumise à des restrictions limitées (le reste du territoire). Au moment du cessez-le-feu, la zone à l’est du mur était inhabitée. Petit à petit, en violation des accords, les séparatistes se sont infiltrés dans la région dans le but évident d’imposer un fait accompli et de modifier le statut de la zone. Le Maroc, avant comme après l’entrée en vigueur des accords de cessez-le-feu, a attiré l’attention des Nations Unies sur les agissements illégaux du polisario.

Dès le 3 septembre 1991, après l’incursion d’éléments du polisario dans la région de Tifariti, feu le roi Hassan II a adressé une lettre au Secrétaire général des Nations unies lui demandant de « prendre les mesures urgentes pour que les choses se retrouvent dans la situation qui se doit, notamment par le retrait hors du territoire de ces bandes armées ». Le Souverain a ajouté : « Le Maroc, qui a la responsabilité du maintien de l’ordre et de la sécurité à l’intérieur des frontières internationalement reconnues du territoire, pourrait de ce fait entreprendre des opérations de police et de nettoyage ».

La démarche marocaine a été par la suite réitérée à plusieurs reprises.

C'est dans la zone soumise à des restrictions limitées que sont organisées, par le polisario, en violation des accords, des « marches », des parades militaires, des "visites officielles" et des spectacles destinés aux caméras de la télévision. C’est à Bir Lahlou que sont reçus des diplomates étrangers

Le Maroc a régulièrement souligné le caractère illégal des activités qui sont menées par les séparatistes dans la zone. Il a attiré l’attention de l’ONU sur le danger que le polisario fait courir aux civils qu’il mobilise pour sa propagande.

Le polisario a opté pour l’escalade dans ses provocations en entreprenant de déplacer ses structures administratives des camps de Tindouf à Bir Lahlou et Tifariti, provoquant une réaction ferme du Maroc, qui a considéré à juste titre ces actions comme un casus belli. Le conseil de sécurité lui a donné raison et demandé au polisario de mettre fin à ses agissements.

Des médias ont évoqué l’intention qui est prêtée au groupe séparatiste de transférer les camps de Tindouf à la zone à l’est du mur. L’Algérie voudrait-elle se débarrasser du boulet que représentent pour elle ceux qu’elle appelle des « réfugiés » ? Cette hypothèse est à première vue séduisante pour le polisario, mais elle ne paraît pas envisageable pour la simple raison que rien n’indique que le pouvoir algérien serait disposé à lever le pied. Sans compter que toute nouvelle provocation dans la zone pourrait pousser le Maroc à entreprendre une « opération de police et de nettoyage » d’envergure pour mettre fin au mythe des « territoires libérés ».

 

Sahara marocain: L’Algérie isolée

 Au commencement, il y a eu l'opération de nettoyage qui a été rondement menée par les forces armées royales récemment à El Guergarate.

Pendant quatre ans, les miliciens du polisario ont perpétré des actes de racket contre les camionneurs marocains et étrangers dans ce poste frontière. Ils les ont rançonnés et n'ont pas hésité à les agresser physiquement et à vandaliser les véhicules. Ils ont franchi une ligne rouge lorsqu'ils ont prétendu bloquer complètement le passage, ce qui a poussé le Maroc à intervenir, non sans avoir auparavant laissé sa chance à la diplomatie, notamment celle des Nations unies.

Quel était le but de l'Algérie en 2016 lorsqu'elle a envoyé les soi-disant « manifestants civils » pénétrer dans la zone tampon au niveau du passage d'El Guergarate pour s'y livrer à des provocations contre le Maroc ? Était-ce pour entretenir un foyer de tension dans ce lieu, en essayant, comme d'habitude, de faire apparaître le Maroc comme un pays agresseur, qui viole le cessez-le-feu et ne respecte pas les accords qu'il a souscrits ? L’Algérie voulait-elle, après avoir vainement essayé tous les prétextes (droits de l’homme, exploitation des ressources naturelles), provoquer un spasme pour remettre aux devants de la scène une question qui peine à sortir d’une certaine léthargie ?  La diplomatie algérienne a pu croire qu’elle pouvait avancer un pion en tablant sur une passivité marocaine. Si tel était l’objectif de l'Algérie, la méthode a été on ne peut plus maladroite et le calcul s'est révélé totalement erroné. Preuve en est que la réaction marocaine a été ferme et que la communauté internationale dans sa grande majorité l’a approuvée.

Comment l'Algérie a-t-elle pu croire une seconde que le blocage de la circulation civile et commerciale sur une voie routière internationale ne soulèverait pas une condamnation unanime ? Comment les stratèges algériens n'ont-ils pas prévu que pas un seul pays, à part le leur (et la Namibie !) n'approuverait et n'appuierait l'intervention marocaine ?

Depuis que ses miliciens ont été chassés du poste frontalier, le polisario ne sait plus où donner de la tête. Confronté au mécontentement de la population des camps dont le désespoir s’accroit devant le manque de perspectives, et pris à partie par des mouvements dissidents, comme « Sahraouis pour la paix », le groupe séparatiste est en proie au désarroi. Faute de mieux, il livre au Maroc une « guerre » imaginaire, à coups de communiqués militaires farfelus, multipliant les attaques et les victimes inexistantes, le tout destiné à la consommation interne. Le polisario semble aussi s’être spécialisé dans la diffusion des fausses nouvelles, grossièrement fabriquées au point d’être risibles. Mais le plus inquiétant serait que de plus en plus de jeunes, qui n’ont rien connu d’autre que les conditions rudes de la vie dans les camps de Tindouf, en désespoir de cause, rejoignent les anciens du polisario qui sont allés grossir les rangs des groupes terroristes qui opèrent dans la région sahélo-saharienne. Entre le banditisme et le terrorisme, le pas est souvent facile à franchir. Voilà une dérive à laquelle les pays de la région doivent prêter la plus grande attention.

Les dirigeants du polisario estiment que le cessez-le-feu a vécu. Ils ont dit et répété qu’ils s’en désengageaient. Pour autant, nous n’avons pas connaissance d’une communication officielle dans ce sens à la MINURSO, la partie avec laquelle le groupe séparatiste a signé l’accord de cessez-le-feu en 1991. Il n’est pas sûr non plus que le bureau de liaison à Tindouf ait été fermé, pas plus que les team-site installés à l’est du mur. Dès lors, ces déclarations sont sans valeur juridique. Du reste, le polisario peut difficilement se passer de la MINURSO, dont les activités et les rapports lui assurent une existence médiatique.

Face aux succès du Maroc et au soutien international qu’il a réussi à mobiliser, l'Algérie s’est trouvée bien seule, avec la Namibie, dans le mauvais camp. Alors qu’elle nous avait habitués à plus de savoir-faire, dans l’épisode d’El Guergarate, l’Algérie a été singulièrement mal inspirée. Pour tout dire, le pays traverse une mauvaise passe, dans un contexte interne plein d'incertitudes du fait de l'absence prolongée du président et des interrogations qu'elle suscite.

Avec un polisario pratiquement désactivé, réduit à « jouer à la guerre sur Playstation » (dixit Mustapha Salma), le gouvernement algérien a vu sa capacité de nuisance considérablement réduite.

L’Algérie perd la main, et le pouvoir ne l’ignore pas.

 

… et la MINURSO ?

Si on pousse le raisonnement jusqu’au bout, l’avenir de la MINURSO est mis en question : sans référendum à organiser et sans cessez-le-feu à surveiller, cette mission n’a plus de raison d’être. Le Maroc a certes réaffirmé son « attachement au cessez-le-feu et au processus politique », mais il a également souligné qu’en se retirant du cessez-le-feu, le polisario « s’est disqualifié de toute participation au processus politique ». Or, il faut être deux pour observer - ou pas - le cessez-le-feu. Si le polisario met réellement ses menaces à exécution et reprend les hostilités (= si l’Algérie lui en donne le feu vert), le Maroc a prévenu : il se réserve « le droit de réagir avec la plus grande sévérité, et en légitime défense, contre toute menace à sa sécurité ». Le premier enjeu sera le contrôle de la zone qui se trouve à l’est du mur de défense.

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(*) Le mot « Algérie » est utilisé par commodité de langage. Il va de soi que ce sont le gouvernement algérien, les autorités algériennes et, plus généralement, le pouvoir algérien qui sont visés.