mardi 3 octobre 2023

Passe d’armes à l’ONU

Réquisitoire contre un agresseur

 

Dans son discours devant l’assemblée générale des Nations Unies, le 19 septembre 2023, le président algérien ne s’est pas fait faute, encore une fois, de sacrifier au rite annuel du rappel de l’antienne favorite d’Alger, la réclamation de l’organisation d’un référendum au Sahara occidental marocain.  

Prenant la parole le 26 septembre, le représentant permanent (RP) du Maroc aux Nations unies à New York, l'ambassadeur Omar Hilale, a souligné que « le Maroc demeure favorable à une solution politique définitive à ce conflit régional artificiel ». Tout en appelant à une  relance de la série de tables rondes, « selon la même formule et avec les mêmes participants, notamment l'Algérie, principale partie à ce conflit », l’ambassadeur a martelé : « L’initiative d’autonomie, dans le cadre de l’intégrité territoriale du Royaume du Maroc et de sa souveraineté nationale, reste la seule et unique solution », sans alternative.

Le représentant algérien a alors demandé à user de son droit de réponse et une passe d’armes s’en est suivie.

C'est une véritable volée de bois vert que le RP du Maroc a administrée à son collègue algérien, Amar Bendjama, le 26 septembre 2023.

N'en déplaise à la presse algérienne, qui -bien entendu-a soutenu le contraire, le recadrage a été magistral.

La joute oratoire dont la salle de l’assemblée générale des Nations unies a été le théâtre est remarquable à un double titre.

S’ils s’affrontent régulièrement au sein de la Quatrième commission et lors des séminaires du Comité des Vingt-Quatre (Comité spécial de l’ONU sur la décolonisation), il est plus rare que le Maroc et l’Algérie s’écharpent au cours du débat général.

C’est, d’autre part, la première fois qu’un diplomate marocain à l’ONU dit ses quatre vérités à son interlocuteur dans un langage incisif et le met au pied du mur. On ne peut qu’approuver car c’est le seul langage qui sied face à des gens de mauvaise foi.

Les arguments marocains sont connus, je ne les reprendrai pas, sauf éventuellement pour les développer, ou ajouter ce qu’Omar Hilale n’a pas eu le temps d’évoquer. Je m’intéresserai aux propos du RP algérien, Amar Bendjama qui s’est accroché à un argumentaire caduc en l’agrémentant de plusieurs contrevérités.

Condoléances forcées

Son gouvernement l’a dit et Bendjama l’a répété, les condoléances algériennes à la suite du séisme qui a frappé le Haouz sont adressées au « peuple marocain frère ». C’est inélégant et contraire à l’usage. Les chefs d’Etat s’adressent aux chefs d’Etat, les ministres aux ministres. Les peuples s’expriment dans la presse et sur les réseaux sociaux. La manœuvre algérienne est cousue de fil blanc et ne trompe personne. La franchise est une des vertus qui sont revendiquées en Algérie. Le pouvoir algérien aurait dû assumer son attitude haineuse et s’abstenir d’exprimer le moindre signe de sympathie, surtout lorsque celle-ci emprunte des voies tortueuses dans une hypocrisie insoutenable.

Quant à « la disponibilité à apporter une aide humanitaire totalement désintéressée aux populations éprouvées par cette catastrophe naturelle », il est permis de douter de la sincérité de ce sentiment, au regard des multiples actes hostiles dont le Maroc et les Marocains sont la cible tous les jours.

L’Algérie est une partie prenante

L’Algérie clame sur tous les tons son « soutien sans faille » aux peuples qui vivent encore sous domination étrangère. « Mais quand donc, s’est écrié non sans emphase Bendjama, comprendra-t-on que notre soutien à la quête de libération des peuples encore sous domination coloniale tire son origine et sa raison d’être dans notre histoire et dans notre lutte pour la libération nationale ? » Belle envolée lyrique, mais qui est démentie dans les faits. L’Algérie concentre son activisme sur un seul différend, celui qui l’oppose au Maroc et dont elle a fait une priorité absolue et un cheval de bataille. Le seul activisme connu de l’Algérie sur le plan international concerne uniquement et exclusivement et de manière obsessionnelle  l’organisation d’un référendum au Sahara marocain. Alger s’est investi dans cette tâche corps et âme, sans compter et sans reculer devant aucun moyen. Dire, comme l’a prétendu le RP algérien que son pays a choisi « le camp de la justice, celui de la décolonisation, celui de la liberté, celui de l'autodétermination et des droits de l'homme », est un abus de langage et une affabulation.

Le pouvoir algérien le sait et nous le savons au Maroc, l’Algérie ne fait pas que « soutenir » un principe, elle est la partie prenante essentielle, zélée et agissante dans un conflit qu’elle a suscité et entretenu depuis 50 ans. Les bandes armées du polisario ne se trouvent pas sur Mars. Elles ne se trouvent pas non plus au Maroc. Elles sont mêlées à une population civile, dans des camps de soi-disant « réfugiés/"citoyens" d’une pseudo république  » délocalisée près de Tindouf. En Algérie. Pour commettre leurs actes d’agression, ou du moins tenter de le faire, les miliciens partent de leur sanctuaire en territoire algérien, avec la bénédiction des autorités algériennes et y retournent - quand ils peuvent. On le voit, l’Algérie ne se contente pas de « soutenir » le polisario, comme le ferait un autre pays hostile comme l’Afrique du sud. Libre à l’Algérie d’avoir une position de principe, de ne pas être neutre, de soutenir une cause ou une idée. Mais rien n’autorise l’Algérie à agresser le Maroc en se servant du polisario, en se cachant derrière le polisario, en envoyant de pauvres bougres à une mort certaine. Nouvelle preuve de l’ambivalence de l’attitude algérienne, de sa duplicité et de sa difficulté à assumer au grand jour ses actes perfides.

Question sui generis

En proclamant que la « question du Sahara occidental » est inscrite à l’ordre du jour à la fois du Conseil de sécurité, de l'assemblée générale et du comité des 24, le RP algérien ne se rend pas compte qu’il se tire en réalité une balle dans le pied et ruine sa démonstration. Cette triple inscription suffit pourtant à elle seule à prouver le caractère inédit de cette question et de l’incertitude qui plane sur sa nature et son statut juridique. C’est, en vérité, un cas sui generis. Ce fut  une question de décolonisation, au reste à l’initiative du Maroc, jusqu’en 1975. Le processus de décolonisation a été mené à bon terme et scellé par les accords de Madrid et le retrait de l’Espagne de l’administration tripartite. Depuis lors, l’Algérie a engagé un bras de fer avec le Maroc. Sauf que le Maroc défend son intégrité territoriale et son unité nationale, tandis que l’Algérie est un agresseur, ni plus ni moins. C’est pourquoi le conseil de sécurité est saisi à titre principal de cette question, au titre du Chapitre VI, et son attitude a évolué au fil du temps, tandis que la Quatrième commission et le comité des 24 débattent épisodiquement de cette réminiscence à titre accessoire et sans réelle avancée.

Terrorisme

Les bandes armées qui sont hébergées en territoire algérien ont un lourd passif en matière de terrorisme. Le polisario a enlevé et assassiné de nombreux ressortissants étrangers, notamment espagnols. Bien qu’il s’en défende, ses liens avec les terroristes du Sahel sont avérés et les allers-retours entre Tindouf et le Sahel sont fréquents. Depuis quelque temps, des individus (algériens) encouragent le polisario à commettre des actes de terrorisme au Maroc. Ces appels semblent trouver quelque écho au sein des bandes armées, dont les chefs menacent régulièrement le Maroc d’actions contre des objectifs civils.

Bendjama a rappelé que « les mouvements de libération ont toujours été accusés de terrorisme ». C’est exact, on est combattant de la liberté pour les uns, terroriste pour les autres. En Algérie, par exemple, le Mouvement pour l'autodétermination de la Kabylie (MAK) a été déclaré mouvement terroriste, sans aucune preuve. Le gouvernement algérien a bien essayé d’impliquer le MAK dans les incendies qui ont ravagé la Kabylie, « avec la complicité du Maroc » ( !), mais sans tromper personne. Quant au polisario, ses fondateurs ou certains d’entre eux ont peut-être été de bonne foi, mais depuis qu’il a été pris en main par les services algériens, c’est devenu un groupe de renégats et de desperados sans idéal dont l’Algérie se sert pour assouvir ses besoins de revanche ou ses pulsions destructrices.

En effet, comme l’a rappelé Omar Hilale, le pouvoir algérien ignore les principes fondamentaux des relations internationales, dont le principe de bon voisinage et celui du règlement pacifique des différends (dont la revue de l’ANP a pourtant récemment fait le sujet de son édito).

 


 Omar Hilale a posé plusieurs questions à Amar Bendjama. Il lui a demandé, en particulier, « qui êtes-vous ? », autrement dit quel est le rôle que vous attribuez à l'Algérie si, comme vous dites, elle n'est pas partie prenante dans la question du Sahara marocain. La diplomatie algérienne a épuisé toutes les déclinaisons possibles au sujet de son statut, sans nommer les choses par leur nom. C'est ainsi que, comme il a déjà été dit (Sahara marocain, vingt questions pour comprendre, Ali Achour), l'Algérie s'est présentée tour à tour comme un simple "observateur" ou  "observateur officiel ", un "pays voisin" ou "limitrophe", ou encore un "pays intéressé", voire une ''partie concernée'', un ''acteur important'', un "simple membre de l'ONU".

L’Algérie ne pourra pas continuer à pratiquer le déni. A ce stade, le dos au mur, il faudra bien qu'elle finisse par jeter le masque et reconnaître l'évidence.

Questions

Le représentant permanent algérien n'a répondu à aucune des questions concernant son pays. Il s’est empressé, en revanche, de prendre la défense du polisario et le fait est assez significatif pour être souligné. En Algérie, il n'est pas recommandé de critiquer le polisario ou le soutien indéfectible du pouvoir algérien au mouvement séparatiste, sous peine de graves ennuis. Il est même de bon ton de faire l'éloge des miliciens de Tindouf et de leurs jurer fidélité pour entrer dans les bonnes grâces des généraux à Alger. Certains s'y emploient avec un zèle méprisable.

Amar Bendjama n'a pas failli à la règle, il a défendu les protégés, en regrettant au passage qu'ils soient « absents ». Des absents qui peuvent compter sur des avocats fidèles, même si, en l'occurrence, Bendjama a été défaillant. Manque de conviction ou désarroi, le représentant permanent algérien qui, pourtant, a de l'expérience, est apparu hésitant dans sa prise de parole. Il a bafouillé et marqué de longs silences. A-t-il eu des difficultés à déchiffrer les éléments de langages qui lui ont été griffonnés à la hâte par ses collaborateurs, ou a-t-il buté sur des passages qui ne lui ont pas donné satisfaction ?

Quoi qu'il en soit, l'Algérie devra un jour ou l'autre répondre aux questions qui lui ont été posées, et à d'autres :

- Que voulez-vous (vraiment) ? 

- Au nom de quel « principe » le pouvoir algérien se permet-il d'accueillir sur son sol des bandes armées dont il se sert pour agresser le Maroc en violation de la charte des Nations unies et de celle de l'UMA, de la Ligue arabe et de l'Union africaine, entre autres ?

- Pourquoi l'Algérie garde-t-elle en otage sur son territoire, dans des conditions infra humaines, des personnes au statut indéterminé et qui peuvent parfaitement retourner dans leur pays si elles le souhaitent ?

Naufrage en couple

L’acharnement des dirigeants algériens contre le Maroc depuis 1962 ne leur a rien rapporté. Ils vont de déconvenues en dépits. « Quand donc l'Algérie comprendra-t-elle » qu’elle a fait fausse route et que le Maroc n’est pas une proie facile ? On n’arrivera pas à déstabiliser le Maroc.  L’entêtement du régime algérien l’a conduit à se brouiller avec plusieurs pays, voisins et lointains. L’Algérie est aujourd’hui un Etat failli, un pays décrédibilisé, sur la défensive et sans influence. On l’a vu avec son élimination par la CAF et le rejet humiliant de sa candidature aux BRICS. On l’a vu également avec des déclarations rien moins que maladroites ou fantaisistes. C’est le prix de plusieurs décennies d’égarement, de mauvais choix, de mots d’ordre bravaches et de slogans éculés. Le meilleur ennemi de la diplomatie algérienne ? Ce sont les titres qui s’étalent à la une des journaux algériens tous les jours et qui insultent à hue et à dia tout le monde, le nord et le sud, l’orient et l’occident. Le régime algérien a lié son sort à celui du polisario. Il court résolument vers un naufrage dans lequel son « soutien » à une cause perdue l’enfonce inexorablement.

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N.B. Est-il vraiment nécessaire de donner du « cher frère » ou « cher collègue » à un représentant du régime d’Alger ? J’estime qu’il faut rester professionnel, surtout lors d’un échange vif, et laisser de côté ce que l’ancien président algérien Bouteflika appelait les « boussboussates ». Les « gestes » relèvent d’un niveau qui dépasse celui des diplomates, y compris les ambassadeurs. On remarquera que Bendjama, de son côté, s’en est tenu à un très neutre « mon collègue du royaume du Maroc ».

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