Sahara
marocain : La bataille à venir
3 mai 2019
Comme prévu, le Conseil de sécurité des
Nations Unies a adopté la résolution 2468 qui proroge pour six mois le mandat
de la MINURSO. Deux pays se sont abstenus : la Russie et l’Afrique du Sud.
L’objet de cette réflexion n’est pas d’analyser la résolution, d’autres l’ont
déjà fait, parfois avec talent, parfois en se livrant à de savants calculs.
Je ne m’intéresserai, pour ma part, qu’aux explications de vote.
Je ne m’intéresserai, pour ma part, qu’aux explications de vote.
Trois membres ne se sont pas exprimés :
la Belgique, le Pérou et la Pologne.
Les délégués qui ont pris la parole ont
affirmé leur soutien au processus politique et aux efforts de l’Envoyé
personnel du Secrétaire général, Horst Köhler. Ils se sont félicités de la
tenue des deux tables-rondes à Genève.
Intervenant en premier, le délégué des
États-Unis, Rodney Hunter, a indiqué que « L’objectif du Conseil de sécurité
devrait être de proposer une solution politique opportune/en temps voulu (timely)
et mutuellement acceptable ». Est-ce à dire que les Américains
souhaitent voir le Conseil jouer un rôle plus actif et proposer son propre
règlement ? Quid alors de l'initiative marocaine ? Quoi qu'il en soit, la
déclaration conciliante du délégué américain contraste avec celles des
représentants des Etats-Unis en 2016 et 2018. Les rumeurs qui, il y a quelques
jours, faisaient état de pressions américaines pour imposer une supervision des
droits de l’homme, voire un ultimatum au sujet de l’avenir de la MINURSO, se
sont apparemment révélées infondées. Recul ou changement de stratégie ?
La française Anne Gueguen, Représentante
permanente adjointe, a exprimé son désaccord avec son collègue américain sur la
durée du mandat de la MINURSO et sur les conditions du maintien de la Mission.
Elle a prôné un retour au mandat d’une année, qui, a-t-elle dit, devrait être
la norme. Elle a souligné, d’autre part, que « l’existence et le mandat de
la Mission ne doivent pas être conditionnés aux progrès des discussions
politiques ». La déléguée française a cité nommément, à trois reprises,
toutes les parties impliquées, évoquant le « dialogue entre le Maroc, le
front polisario, l’Algérie et la Mauritanie ». Elle s’est référée, par
ailleurs, aux « quatre délégations ». Enfin, elle a rappelé que, pour la
France, « le plan d’autonomie marocain de 2007 est une base sérieuse et
crédible de discussions ».
Le Représentant permanent adjoint du
Koweït, Bader Abdullah Al-Munayikh, a exprimé le soutien de son pays, comme en
2018, à la souveraineté et l’intégrité territoriales du Maroc et s’est félicité
de l’initiative marocaine d’autonomie.
L’ambassadeur de la Côte d’Ivoire,
Claude Stanislas Bouah-Kamon, a estimé que l’initiative « sérieuse et
crédible » du Maroc en faveur de l’autonomie constitue une bonne base de
discussion.
L’ambassadeur allemand, Christoph
Heusgen, se faisant visiblement l’interprète des préoccupations de son
compatriote Köhler, a plaidé pour un accès de l’Envoyé personnel et son équipe
« aux parties sans restrictions ». Il a invité le Maroc et le polisario
à établir des mesures de confiance avant la prochaine table-ronde pour créer
les conditions propices. Le Sahara n’est pas un conflit abstrait, a-t-il
précisé, mais il impacte la vie quotidienne de milliers de personnes.
Le délégué de la Chine a souhaité des
consultations plus approfondies sur le renouvellement du mandat de la MINURSO «
pour parvenir à un consensus ». Il a rappelé la position « cohérente »,
« objective et impartiale » de la Chine dans la question du Sahara. En
2018, la Chine s'était abstenue, en faisant savoir que les « préoccupations de
certaines parties » n’avaient pas été pleinement prises en compte.
Comme en 2016 et en 2018, la Russie
s’est abstenue. En 2016, le délégué russe avait affirmé que la résolution 2285
présentait des « insuffisances fondamentales », en citant le neuvième
paragraphe du préambule, pour mettre en cause les « efforts marocain sérieux
et crédibles [qui] ont été faits pour aller de l’avant vers un règlement
». Le Maroc n’avait alors publié aucun commentaire. En 2018, le représentant
russe avait justifié l’abstention de sa délégation par le caractère « déséquilibré
» du projet qui était soumis au conseil et à propos duquel les remarques
russes n’avaient pas été prises en compte. Il avait averti contre tout
changement du mandat de la MINURSO, comme l’attribution à la mission onusienne
de compétences en matière de surveillance des droits de l’homme.
Cette année, la Russie a, de nouveau,
exprimé une série de griefs et s’est élevé contre la modification des « paramètres
déjà établis ». Le Représentant permanent adjoint, Vladimir Safronkov, a
abordé les points ci-après :
- Il n’est pas judicieux de créer une
"polémique artificielle" concernant le renouvellement du
mandat de la MINURSO, ou essayer de préjuger de la direction à donner au
processus politique.
- Il n’est pas acceptable non plus d’essayer de modifier les paramètres déjà établis. Ces dernières années, dans les résolutions renouvelant le mandat de la MINURSO, des amendements ont été apportés, qui ont une incidence négative sur la démarche du conseil de sécurité. La Russie ne peut pas accepter la dilution de paramètres déjà convenus, qui sont définis par les parties au conflit de façon à pouvoir trouver une solution mutuellement acceptable. La délégation russe n’était pas d’accord avec ces amendements les années précédentes, mais ses arguments « ont été ignorés ». Ce qui pose à nouveau la question du système du pen holder (pays auteur du projet de résolution). Remplacer des principes de base relatifs à ce processus par des généralités sur la nécessité de trouver des solutions réalistes et pratiques ou trouver des compromis ne fait que créer des ambigüités et sape la confiance dans le Conseil, assombrissant ainsi les perspectives du processus politique.
- Il n’est pas acceptable non plus d’essayer de modifier les paramètres déjà établis. Ces dernières années, dans les résolutions renouvelant le mandat de la MINURSO, des amendements ont été apportés, qui ont une incidence négative sur la démarche du conseil de sécurité. La Russie ne peut pas accepter la dilution de paramètres déjà convenus, qui sont définis par les parties au conflit de façon à pouvoir trouver une solution mutuellement acceptable. La délégation russe n’était pas d’accord avec ces amendements les années précédentes, mais ses arguments « ont été ignorés ». Ce qui pose à nouveau la question du système du pen holder (pays auteur du projet de résolution). Remplacer des principes de base relatifs à ce processus par des généralités sur la nécessité de trouver des solutions réalistes et pratiques ou trouver des compromis ne fait que créer des ambigüités et sape la confiance dans le Conseil, assombrissant ainsi les perspectives du processus politique.
- Pas de solution imposée de
l’extérieur aux parties.
- La persistance du différend peut
profiter à des forces extrémistes, ce qui aurait une incidence très négative
sur la situation politico-militaire dans toute la région.
Tout compte fait, la mauvaise humeur russe semble viser principalement le pen holder, formule qui, selon toute vraisemblance, met les Etats-Unis et la France dans le même panier.
L’intervention du représentant de l’Afrique du Sud, Jerry Matthews Matjila, la plus longue de la séance, a été entièrement dirigée contre le Maroc. Matjila a été le seul à évoquer le référendum. Il a également estimé que les termes « réaliste », « réalisme » et « compromis » n’étaient pas clairs. Agissant pour le compte de l’Algérie, il a fait remarquer que la résolution ne fait pas de distinction entre les parties au conflit et les pays voisins. L’ambassadeur sud-africain s’est volontairement référé au Maroc et à la « rasd », « tous deux membres de l’Union africaine », alors que la pseudo république n’est pas reconnue par l’ONU et n’est pas concernée par le processus en cours.
Tout compte fait, la mauvaise humeur russe semble viser principalement le pen holder, formule qui, selon toute vraisemblance, met les Etats-Unis et la France dans le même panier.
L’intervention du représentant de l’Afrique du Sud, Jerry Matthews Matjila, la plus longue de la séance, a été entièrement dirigée contre le Maroc. Matjila a été le seul à évoquer le référendum. Il a également estimé que les termes « réaliste », « réalisme » et « compromis » n’étaient pas clairs. Agissant pour le compte de l’Algérie, il a fait remarquer que la résolution ne fait pas de distinction entre les parties au conflit et les pays voisins. L’ambassadeur sud-africain s’est volontairement référé au Maroc et à la « rasd », « tous deux membres de l’Union africaine », alors que la pseudo république n’est pas reconnue par l’ONU et n’est pas concernée par le processus en cours.
On l’a compris, à en juger par la
déclaration de l’ambassadeur représentant permanent de l’Allemagne, Horst
Köhler semble particulièrement sensible aux souffrances des personnes retenues
dans les camps de Tindouf. J’ai déjà eu l’occasion de m’exprimer sur la
problématique de ces camps.
(https://www.facebook.com/ali.achour.1411/posts/10217658977122972).
C’est, à mon avis, sur ce point que devrait porter, avec tout son poids et ses ressources, l’action diplomatique de notre pays.
C’est, à mon avis, sur ce point que devrait porter, avec tout son poids et ses ressources, l’action diplomatique de notre pays.
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